Bonjour,
Je vous souhaite de très beaux voyages de lectures.

Email: patricia.lepic@gmail.com

@Like Oui Said

Cet homme est un conteur, un poète, et un cuisinier du bonheur.

« Ici la technologie culinaire se fait discrète, sous-jacente, et ne doit surtout pas envahir. »

Écrevisses pattes rouges en infusion parfumée, spéciales d’Arcachon en ravioles de chair de Saint-Jacques, truffe à la truffe cuite entière à l’étouffée, foie gras de canard des landes snacké… Quartier d’agneau de lait des Pyrénées, jeu de bolets, le carré rôti, l’épaule au four, les ris confits dans l’argile… Et desserts à commander en début de repas : parfait craquant de chocolat.

Conception, poire pochée au Lapsang Souchong, glace au caramel salé, perles de mangoustan, marrons glacés Mont Blanc parfait vanille, gelée de rhum. Saint Aubin 1er cru En Remilly 2008, Saint-Emilion Grand cru Château le Chatelet 2008. Café, petits fours…

Un inventaire à la Dutournier, c’est une cuisine d’inspiration, une cuisine généreuse faite de trois fois rien comme le dit le cuisinier : trois éléments maximum dans une assiette. Un rendez-vous avec Alain Dutournier, c’est comme une promenade dans les Landes, dans ses Landes, durant laquelle vous vous dites, après un certain temps, qu’il va bientôt falloir faire demi-tour, car il faut reprendre le même chemin en sens inverse pour rentrer. Seulement voilà, pas facile d’arrêter un homme qui commence une nouvelle anecdote sitôt la précédente achevée ! Lorsque, à la fin des ses études d’hôtellerie, Alain Dutournier envoie des lettres de demande de stage chez les chefs étoilés de l’époque (nous sommes dans les années 1970), il n’obtient aucune réponse. Qu’à cela ne tienne, notre chef moussaillon part pour voyager et travailler aux quatre coins du monde, où il s’enrichit des expériences culinaires du Moyen Orient, de l’Afrique du Sud, de l’Asie. L’enfant de l’Adour, qui se servait de la farine comme pâte à modeler, fera de même plus tard avec la cuisine, qu’il modèlera avec audace et succès. Après une expérience dans les gigantesques cuisines d’Air France où le challenge quotidien consiste à préparer jusqu’à 20 000 repas par jour, Alain est bien décidé à faire évoluer la cuisine vers la qualité. Son esprit s’est ouvert aux cuisines du monde, mais c’est décidé : c’est la cuisine du sud-ouest qu’il va interpréter et surtout faire découvrir aux Parisiens.

Du Trou Gascon au Carré des Feuillants

Octobre 1973. Alain à vingt-quatre ans, quelques économies en poche et l’hypothèque de l’auberge familiale. Il ouvre un restaurant dans le 12e arrondissement à Paris : Le Trou Gascon. Gros challenge. Un an sans aucun jour de fermeture, en servant parfois seulement trois à huit couverts par jour : la première année est une véritable période de galère pour Alain et pour sa femme Nicole. Puis, petit à petit, un bouche à oreille de qualité fait son chemin. De fidèles et non moins célèbres habitués comme Claude Chabrol, Orson Wells ou encore Jean-François Revel adoptent Alain et lui permettent de gagner son pari : servir, à une clientèle habituée à des standards culinaires, sa cuisine « aux travers d’huîtres chaudes en crépinettes gourmandes de ris de veau, filets de lisette au corail d’oursin, et fricassée minute de poulet aux oignons caramélisés et piments de jardin ». Adieu crème, grillades, moutarde et frites, une nouvelle cuisine vient de naître, avec de nouvelles sensations et de nouveaux plaisirs.

Passionné de vins, Alain est nommé Meilleur sommelier-restaurateur en 1976. Ce qui l’incitera à ouvrir en 1980 les Caves de Marly dans les Yvelines : une nouvelle activité de conseil, stockage, vente et négoce de vins et spiritueux, sur plus de mille mètres carrés ! En 1977, il obtient 16/20 au Gault-Millau et sa première étoile ! Cinq ans plus tard viennent la deuxième étoile et un 18/20 au Gault-Millau. Alain cherche alors à s’agrandir et à se rapprocher du centre de Paris. Il trouve un lieu caché, un bâtiment au fond d’une cour, les restes des communs du couvent des Feuillants, où dormaient « valetaille et animaux » ! Adieu poules et lapins, le nouveau Carré des Feuillants devient un lieu parisien incontournable, niché au fond d’une porte cochère de la rue de Castiglione, à deux enjambées du parc des Tuileries. Les deux étoiles ont déménagé et se sont confortablement installées dans leur nouveau décor. À l’heure où j’écris ces lignes, elles y sont toujours.

Pinxo et son Chevalier-Commandeur

Membre des Relais et Châteaux en 1991, Alain est nommé Meilleur chef de l’année par ses pairs en 1996. Chevalier dans l’Ordre National du Mérite en 1991, il est fait Chevalier dans celui des Palmes Académiques en 2002, puis Commandeur dans l’Ordre des Arts et des Lettres, et devient en 2004 membre du Conseil de L’Ordre des Arts et des Lettres auprès du ministère de la Culture. À partir de cette ligne, nous parlerons donc du Chevalier-Commandeur Dutournier, qui ouvre en 2003 un nouveau et turbulent restaurant ouvert tard le soir, où la cuisine et la salle ne font qu’un. Pinxo est son nom, la cuisine conceptuelle est basée sur le partage : en Aquitaine, « pincher » signifie chiper dans l’assiette du voisin. Chaque plat est divisé en trois parts afin de subir d’éventuelles attaques. Idem pour les vins qui sont proposés par gammes de prix.

Il ne me reste donc plus qu’à vous souhaiter un très bon appétit, en vous imaginant déjà assis dans l’un des deux temples de notre Chevalier de la Légion d’honneur (2007). Et pour tout ceux qui hésiteraient encore, sachez que la carte des vins est l’une des plus impressionnantes de la capitale, avec plus de trois mille cinq cents références choisies par le Chevalier lui-même, et plus de deux cents références de bas-armagnacs. N’ai-je pas fait de mon mieux pour vous y entraîner ?

Patricia Courcoux Lepic

My stories

Wine
Wine
Wine Champagne Spirit
Art
Art
Architecture Painting Design Fashion Photo
Culture
Culture
Literature Music Palaces Hotels Restaurants Chefs