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Je vous souhaite de très beaux voyages de lectures.

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« Un Ricard, sinon rien » : tout le monde connaît le slogan de la marque bleu et jaune car, dans l’esprit collectif, le Pastis Ricard fait partie du patrimoine national français. Mais qui connaît véritablement son origine ?

L’histoire de cette emblématique boisson est étroitement liée à l’évolution de la consommation et de la réglementation des spiritueux au cours du XXe siècle. Tout commence dans le Marseille des années 1930. Le jeune Paul Ricard a alors dix-sept ans. Passionné de chimie, il est également doué pour le dessin et entre à l’école des Beaux-Arts de Marseille. Parallèlement à ses études, il accompagne souvent son père, négociant en vins, dans ses tournées commerciales. À cette époque, les liqueurs anisées sont légion dans les cafés mais la plupart sont clandestines et un peu trop douceâtres au goût des consommateurs.

Paul Ricard décide de créer sa propre recette, une formule qui plaise au plus grand nombre. Dans un laboratoire improvisé il fait macérer du fenouil, de l’anis et des plantes provençales : il distille, filtre, teste des tas de combinaisons jusqu’à obtenir ce qui lui semble être la meilleure recette. C’est chose faite en 1932 avec la naissance du pastis « à la marseillaise » : un volume pour cinq volumes d’eau fraîche et des glaçons ! « J’engage mon nom car je suis sûr de la grande qualité de mon pastis et je suis fier de son goût unique » proclame le jeune inventeur.

Naissance du « Pastis de Marseille »

Avec le soutien et l’aide de son père, Paul installe sa première usine à Sainte-Marthe, le quartier de Marseille où il est né, et lance sa propre marque de pastis à 40° conformément à la réglementation en vigueur à l’époque. C’est un succès, les ventes s’envolent à Marseille mais aussi dans tout le sud-est de la France jusqu’à Lyon. L’ancien élève des Beaux-Arts mesure l'importance des couleurs et, pour que son produit soit visuellement reconnaissable, il choisit un bleu et un jaune vifs, symboles de la mer et du soleil de Marseille, berceau du pastis. En 1932, il dessine lui-même l'étiquette dans le but qu'une personne ne sachant pas lire soit capable d'identifier immédiatement le produit. Avec le Front Populaire, la France découvre en 1936 les premiers congés payés et le Ricard bénéficie de l’engouement de ces nouveaux vacanciers du bord de mer et sous le soleil de Provence. En 1938, la loi autorise les pastis à 45°, ce qui permet à l’entreprise de se positionner la première sur ce marché, le Pastis Paul Ricard révélant tous ses arômes à 45°. L’année suivante, la première campagne publicitaire est lancée : « Le Pastis de Marseille » Paul Ricard part aussitôt à la conquête de Paris et du reste de la France. Le succès est fulgurant, cette année-là il s’écoule plus de 2,4 millions de litres !

La seconde guerre mondiale éclate un an plus tard et le régime de Vichy interdit tous les apéritifs titrant plus de 16°. Pour préserver son personnel du Service du Travail Obligatoire en Allemagne (STO), Paul Ricard propose à ses ouvriers de se reconvertir dans l’agriculture et relance la riziculture sur le domaine de Méjanes en Camargue, qu’il a acquis dans les années 1930. La fin de la guerre ne signifie pas encore le retour du pastis à 45° qui reste interdit : un décret rétablit les apéritifs comme les eaux-de-vie, les liqueurs et les whiskies mais à 40° au plus. À la tête du Syndicat des fabricants d’anis du sud-est, le jeune industriel ne désamorce pas et se bat pour l’autorisation du pastis à 45°. Six ans plus tard, le 24 mai 1951, Paul Ricard obtient gain de cause et le retour du véritable Ricard est accueilli triomphalement par les cloches de Sainte Marthe. L’entreprise familiale renoue rapidement avec une croissance insolente.

Mais cette même année, une loi vient interdire la publicité des anisés. De cette interdiction Paul Ricard va faire une nouvelle arme. Grand communicant et visionnaire, il invente la communication globale incluant le sponsoring, le mécénat, le merchandising et autres animations commerciales. C’est ainsi que brocs, verres, doseurs, carafes siglés Ricard voient le jour. Il est l’inventeur de la communication par l’objet : c’est lui qui dessine le mythique broc Ricard en grès. Jamais à court d’une bonne idée, il fera livrer ses clients parisiens en chameau pendant la crise de Suez ! Autre innovation : il fonde en 1949 la société Protis Films et monte ses propres studios qui produisent des films en couleur. Chaque sortie s'accompagne de réceptions et de conférences de presse diffusant le nom de Ricard. Les studios accueillent aussi les stars de passage comme Joséphine Baker, Eddie Constantine ou Line Renaud.

Paul le mécène

Depuis le début de l’aventure, Paul Ricard élève le mécénat au rang de culture d’entreprise. Il crée en 1966 l’Institut Océanographique qui porte son nom, pour protéger la mer. Dans le domaine culturel, il soutient les arts plastiques en créant la Fondation Culturelle Paul Ricard en 1967 ; dans celui du sport, son nom reste attaché à la création en 1970 du Circuit Paul Ricard et au trimaran sur lequel Eric Tabarly bat le record de l’Atlantique en 1980. C’est ainsi qu’au fil des années, Ricard entre dans le patrimoine national. L'une de ses réussites les plus spectaculaires reste néanmoins le circuit Paul Ricard du Castellet. Inauguré le 19 avril 1970, il accueille les plus grandes manifestations automobiles, devenant une référence mondiale des sports mécaniques et assurant une couverture médiatique internationale.

À partir des années 1960, Paul Ricard crée des centres de production dans toutes les régions : à Thiais, Lille, Bordeaux, Rennes, Lyon, Toulouse pour n’en citer que quelques-uns, qui permettent une progression spectaculaire de la marque. Lorsqu’il quitte l’entreprise en 1968, Ricard est devenu le leader mondial de l’anis. Aujourd’hui la bouteille Ricard reste un emblème. Reconnaissable immédiatement, elle fait l'objet depuis 1993 d'éditions limitées, dont certaines signées de créateurs comme Sonia Rykiel. En quatre-vingts ans de communication, la marque est même devenue une source d'inspiration pour des artistes comme César et sa compression de 1962.

Patricia Courcoux Lepic

Elaboration d’une recette gardée secrète depuis 1932

Voici une recette inchangée depuis plus de 80 ans et dont la réputation repose sur la sélection très rigoureuse d’ingrédients naturels. Le premier est la badiane de Chine ou anis étoilé, qui pousse dans la province de Guangxi dans le sud de la Chine. C’est l’ingrédient principal du Pastis Ricard. En collaboration avec des paysans chinois, les meilleurs fruits sont cueillis à la main, séchés au soleil puis distillés une première fois sur place afin de préserver l’arôme de la badiane en huile essentielle d’anis. Ensuite, c’est au Moyen Orient qu’il faut se rendre pour trouver la réglisse. Cette racine aromatique, qui donne au Ricard sa couleur jaune, est choisie avec attention par les sélectionneurs : les bâtons de réglisse les plus riches en arômes sont retenus. Ils sont nettoyés, triés et séchés sur les lieux de la récolte également. C’est cet ingrédient qui apporte sa rondeur au Pastis Ricard. Retour enfin en Provence pour les plantes aromatiques de la garrigue, qui viennent compléter et donner la touche finale : thym, sarriette, marjolaine ? C’est un secret !

Arrivées au centre d’élaboration aromatique, les huiles essentielles d’anis subissent une purification appelée « rectification ». Le même soin est apporté à la réglisse qui subit une triple macération à chaud, un procédé qui permet d’extraire les arômes et d’obtenir un liquide parfaitement homogène. Le mélange des différents ingrédients s’effectue ensuite selon un protocole qui garantit la constance de la saveur Ricard. Une triple filtration est encore effectuée avant la mise en bouteilles. Chaque bouteille de Ricard est soumise à plus de cinquante contrôles qualité sur les ingrédients et sur le produit fini. Puis c’est enfin au tour des dégustateurs de tester quotidiennement les produits sur les sites de production. Pour consommer avec modération et déguster ce véritable Pastis Ricard dans les règles de l’art, il ne reste plus qu’à verser dans un verre 2 cl de Ricard puis 10 cl d’eau fraîche et d’ajouter des glaçons. Selon le goût de chacun, on pourra l’allonger avec un peu plus d’eau. Bonne dégustation.

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