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Je vous souhaite de très beaux voyages de lectures.

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Histoire d’un champagne rouge et or commencée au siècle des lumières. Parmi les familles Heidsieck, il y a de quoi se perdre au pays des bulles. Entre Piper-Heidsieck, Charles Heidsieck et Heidsieck & Co Monopole, qu’il y a t-il de commun ? Le même fondateur : Florens-Louis Heidsieck, venu de Westphalie pour s’installer à Reims comme drapier, pour y finir dans le vin.

Une cuvée présentée à Marie-Antoinette

Tout commence donc avec Florens-Louis Heidsieck, né en 1749, fils d’un pasteur protestant de Westphalie. Venu s’installer à Reims comme drapier, il tombe amoureux à la fois d’une belle Champenoise et du vin de la Champagne. Ni Rémois ni vigneron, il décide néanmoins de créer une cuvée de champagne. Talentueux et travailleur acharné, Florens-Louis Heidsieck réalise ainsi sa première cuvée en 1780. Cinq ans plus tard, en 1785, il fonde son entreprise de distribution de champagnes et de négoce de draps, Heidsieck & Cie. Il devient rapidement un expert dans l’art du champagne, au point que, lors d’un séjour à la cour de Versailles, il aurait présenté à la reine Marie-Antoinette un flacon de champagne dans une bouteille originale pour l’époque, la pinte majeure. En 1800, il est rejoint par son neveu Christian Heidsieck, et en 1815 par son petit-cousin Henri-Guillaume Piper, né en 1801 en Prusse. Faute de descendance, c'est son neveu Christian qui reprend la Maison de Champagne après son décès en 1828. Des princes de Habsbourg aux empereurs de Chine, pas moins de quatorze cours royales et impériales lui accordent alors le privilège de « Fournisseur patenté ». À cette époque, toute la bonne société souhaite avoir à sa table « le vin de Piper, élaboré par Heidsieck ». À la mort de Christian en 1837, sa veuve reprend la Maison puis se remarie avec Henri-Guillaume Piper. L’entreprise devient alors H. Piper et Cie, tout en continuant à vendre son champagne sous le nom de Heidsieck, et enfin de Piper-Heidsieck.

De Kunkelmann et Cie à Pipier-Heidsieck

Henri-Guillaume Piper développe son affaire avec énergie et s'attaque avec succès au marché américain. À sa mort en 1870, Jacques-Charles Kunkelmann, associé depuis 1851, acquiert le contrôle de la firme et en change la dénomination en Kunkelmann et Cie. Grand promoteur et grand communiquant, c’est lui qui fait dessiner en 1885 par Pierre-Karl Fabergé, joaillier du tsar de Russie Alexandre III, une bouteille en diamant, or et lapis-lazuli, un tirage évidemment très limité pour célébrer le centième anniversaire de la marque. Son fils Ferdinand-Théodore Kunkelmann en poursuit l'exploitation sous la même raison sociale qui, plus tard, deviendra à nouveau Piper-Heidsieck sous le double patronage de Florens-Louis Heidsieck et de Henri-Guillaume Piper.

Sa fille Yolande épouse en 1926 le marquis Jean de Suarez d’Aulan. Pionnier de l’aviation, cet homme remarquable entre dans l’aventure de la Maison de Champagne et en assure la promotion en parcourant le monde aux commandes de son propre avion. Durant la seconde guerre mondiale, cet homme d’action accepte de cacher dans ses caves des armes parachutées d'Angleterre pour servir à la libération de la Champagne. Dénoncé, il s'échappe en Afrique du Nord en 1942 et, pilote de chasse dans l'escadrille La Fayette, il est tué en combat aérien en 1944 au-dessus de l'Alsace. Pendant ces pénibles années, la Maison Piper-Heidsieck, pillée et occupée, est placée sous séquestre par l'occupant. Elle aurait sans doute périclité à la Libération faute de stocks si elle n'avait été brillamment relancée par Yolande, secondée par le général baron d’Alès avec qui elle se remarie en 1945. François d’Aulan, fils ainé du marquis Jean de Suarez d’Aulan et de Yolande Kunkelmann, lui succède en 1957. Pendant trente-trois ans, il assure la présidence des champagnes Piper-Heidsieck en conciliant les impératifs de développement et la pérennité familiale. Après des séparations, de multiples rachats et histoires de famille, Piper-Heidsieck et Charles Heidsieck sont à nouveau frères et désormais réunis au sein du groupe EPI, propriété de la famille Descours. Quant à Heidsieck & Co Monopole, il appartient aujourd’hui à Vranken.

Le Champagne diamant et or de Hollywood

Le champagne Piper-Heidsieck aime le cinéma et celui-ci le lui rend bien, depuis longtemps. Jack Warner et Louis B. Meyer faisaient apparaître Piper-Heidsieck dans pratiquement tous leurs films ! De nombreux grands acteurs d’Hollywood le mirent à l’honneur : Stan Laurel et Oliver Hardy en 1933 dans Les Compagnons de la nouba (Sons of the Desert) ou encore Clark Gable, Fred Astaire, Humphrey Bogart et jusqu’à Marilyn Monroe qui aimait s’endormir habillée de quelques gouttes de Chanel n°5 et… se réveiller avec une coupe de Piper-Heidsieck ! Personne n’oubliera non plus ce melchisédech de 48 litres (l’équivalent de soixante-quatre bouteilles, millésimé 1959), la plus grande bouteille du monde créée à la taille de l’acteur anglais Rex Harrison (1,82 m), pour célébrer sa victoire aux Oscars dans My Fair Lady. Venise, Berlin, Londres, San Sebastian, Chicago, Tokyo : la Maison Piper-Heidsieck a apporté son soutien à de nombreux festivals. À Boston, le Prix Piper-Heidsieck a récompensé entre autres Jodie Foster, Geena Davis et Anjelica Huston. Au Sundance Film Festival, Geena Rowlands, Kevin Spacey et Benicio Del Toro ont eux aussi partagé cet honneur. Depuis 1993, Piper-Heidsieck est le fournisseur officiel du Festival de Cannes et partenaire de la Cinémathèque française depuis 2008.

Un siège ultramoderne, allée des Vignes à Reims En 2008, la Maison Piper-Heidsieck demande à Jacques Ferrier de concevoir son nouveau siège social, avant que l’architecte parisien réalise le fameux pavillon français de l’Exposition universelle de 2010 à Shanghai. Piper-Heidsieck y ajoute le talent du designer d’intérieur italien Ferruccio Laviani, salué notamment pour ses réalisations avec Kartell. Reflet du ciel, suggestion pixélisée de l’effervescence des bulles, hommage à la technicité d’un métier d’excellence : les deux grands créateurs ont joué chacun leur partition dans le respect de celle de l’autre pour façonner l’une des architectures les plus contemporaines du vignoble champenois.

Patricia Courcoux Lepic

 

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